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la lettre du réseau bronchiolite IDF
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12 janvier 2007

Réponse

nous mettons ici en ligne le droit de réponse que nous avons sollicité auprès de la rédaction de la revue "Precrire", qui avait, en novembre 2006, fait parraître un article virulent contre la kinésithérapie respiratoire.
nous avons par ailleurs demandé à KA de publier une réaction à cet article.


Réponse à l’article de prescrire : « Bronchiolite : pas de kinésithérapie respiratoire systématique. Absence d’efficacité démontrée mais risque de fracture de cotes. »

Le conseil d’administration d’ARB

 

http://www.reseau-bronchio.org

 

Après la lecture de la synthèse réalisée par la Rédaction de « Prescrire » à propos de la kinésithérapie respiratoire prescrite chez les nourrissons atteints de bronchiolite, l’association des réseaux bronchiolite ARB, représentée par son bureau, sollicite un droit de réponse.

 

Chers amis de la rédaction de « Prescrire »,

Tout d’abord merci d’avoir ouvert vos colonnes à ce marronnier, sujet récurent s’il en est, puisqu ‘en ce mois de décembre 2006, nous sommes en plein cœur de l’épidémie automno-hivernale de bronchiolite aiguë du nourrisson.

Il semble donc légitime de traiter de ce sujet d’actualité.

Toujours avides d’informations, nous ne pouvions qu’être interpellés par cet article, dans le sens où il suggère des données nouvelles susceptibles d’éclairer différemment les pratiques actuellement préconisées (1), qui commencent à prendre de l’age, et ne concernaient que le premier épisode de bronchiolite.

Il nous semble en effet tout à fait pertinent de questionner, d’interroger les pratiques pour les faire évoluer, conforter ou développer les savoirs existants et/ou les remettre en question.

C’est donc avec grand intérêt que nous avons poursuivi notre lecture.

Nous, nous représentons le conseil d’administration de l’association des réseaux bronchiolite d’île de France, ARB, association regroupant 700 kinésithérapeutes d’île de France, et 300 médecins, réunis autour d’un objectif commun, assumer la continuité des prises en charge et des soins des petits patients durant les week-end et les jours fériés. Cette mobilisation permet d’assurer à ces enfants atteints d’une affection qui représente un problème avéré de santé publique, qu’ils ne verront pas leur état de santé se dégrader, du fait d’une vacuité de la réponse pertinente aujourd’hui identifiée, et que leurs parents ne seront pas contraints à se diriger vers les services d’urgences des hôpitaux, faute de réponse des professionnels de santé de ville.

En 6 années de fonctionnement, nous avons pu colliger un certain nombre de données, qui peuvent être contributives à un certain éclairage de la pertinence de la kinésithérapie respiratoire vis-à-vis de ces nourrissons, bien qu’elles n’aient actuellement pas fait l’objet de recherches à caractère scientifique.(2 – 3 – 4 - 5)

Entre 2000 et 2005, plus de 25000 séances de kinésithérapie respiratoire ont été identifiées réalisées par les kinésithérapeutes du réseau. Cette estimation est basse, dans la mesure où le recueil des données n’était pas exhaustif dans les premières années de fonctionnement, et qu’elle ne prend en compte que les séances documentées effectuées dans le cadre des week-ends. Nous avons cependant colligé près de 20000 fiches d’évaluation de l’état clinique des nourrissons pris en charge dans le réseau, relatant les indicateurs biomédicaux usuellement reconnus pour évaluer ces derniers. (6)

1ères journées de médecine générale) Les documents d’observation et de communication développés par le réseau constituent une base de données qui permet de valider la qualité d’observation, l’analyse critique des pratiques, et la justification des interventions.

Nous avons réalisé, depuis 6 ans, 120 journées de formation auprès de 1200 kinésithérapeutes

Et nous avons initié des formations médico-kinésithérapiques, regroupant médecins et kinésithérapeutes, autour du thème de la bronchiolite, qui ont permis le dialogue l’interaction et partage de valeurs entre ces professionnels.

Nous avons mené plusieurs projets de recherche et participons au PHRC plus connu sous le nom de bronkinou.

Les observations, conduites à partir des données émanant de notre centre d’appels, nous permettent de suivre les épidémies successives avec une fiabilité qui nous a valu d’être considérés comme contributifs aux données épidémiologiques nationales. (INVS, cellule interrégionale d’épidémiologie île de France)

 

Le ton volontairement déstabilisant de cet article nous a d’emblée surpris.

 

Sur le plan méthodologique, nous nous sommes étonnés du choix du titre, des sous titres, confortant et orientant un lecteur pressé dans une interprétation rapide des propos :

«Bronchiolite, pas de Kinésithérapie respiratoire systématique, absence d’efficacité démontrée mais risque de fracture de côtes (sous entendu avérée et fréquente) ; « Kinésithérapie : pas d’efficacité démontrée »

« Des effets indésirables »

« En pratique, pas de kinésithérapie, et transfert aux parents de la surveillance de leur enfant ».

Le poids des mots…

 

Quel argumentaire soutient donc de telles affirmations, qui engagent les lecteurs, médecins et donc prescripteurs, à modifier leurs attitudes du tout au tout, à revenir sur des acquis, récents, confortés par des constatations cliniques, mais pas forcément stabilisés ?

 

Nous nous proposons de répondre point par point aux déclarations de cette synthèse.

 

« Kinésithérapie : pas d’efficacité démontrée »

L’état des lieux des connaissances.

En préalable, nous tenons à préciser que nous partageons parfaitement avec vous le constat que la bronchiolite aiguë du nourrisson est une affection fréquente, le plus souvent bénigne, et que le recours à l’hospitalisation doit rester exceptionnelle. (1 à 2% des cas diagnostiqués selon la littérature). Cette remarque peut sembler anodine, mais permet d’appréhender une donnée qui nous parait essentielle à prendre en compte: la prise en charge en ville se prête difficilement aux analyses statistiques, et fait donc exceptionnellement l’objet de publications recevables sur le plan scientifique. Cela est vrai pour les médecins, et encore plus pour les kinésithérapeutes, dont la formation et la culture ne les conduisent pas spontanément à cette démarche. Il n’est pas dans la culture ni dans les missions des praticiens de ville de soumettre leurs patients à des expérimentations.(7).

Les auteurs de la synthèse précisent dans un premier temps que la kinésithérapie respiratoire est un terme générique qui ne revêt pas la même signification de par le monde. La spécificité française, qui est à l’origine des conclusions de la conférence de consensus de 2000, consiste, sur le plan technique, à s’appuyer sur une dynamisation du flux expiratoire, connue sous le terme « d’augmentation du flux expiratoire », foncièrement différent des techniques anglo-saxonnes, qui font elles référence à des percussions thoraciques ou à des postures de drainage utilisant la pesanteur comme « effet drainant ». Ces techniques ont été récusées par la conférence de consensus de septembre 2000, confirmant les conclusions de la conférence de consensus sur les techniques de kinésithérapie respiratoire de LYON, 1994, et n’ont donc plus leur place aujourd’hui dans le débat contradictoire. Pourquoi donc les appeler dans l’analyse des « essais évaluatifs », en suggérant qu’elles discréditent la kinésithérapie respiratoire française ? Quel intérêt y a –t-il à présenter les résultats négatifs  de pratiques fondamentalement différentes de celles préconisées dans l’hexagone ? Pourquoi amalgamer des propositions récusées (percussions thoraciques et drainage postural) et des propositions retenues et évaluées pertinentes (AFE) versus absence de kinésithérapie respiratoire ?

Quelle preuve établi-t on  en proposant au lecteur un résumé de 3 essais, conduits en Argentine et au Royaume Uni, en secteur hospitalier (1 à 2 % des cas), mettant en oeuvre des méthodes de prise en charge foncièrement différentes de celles préconisées sous nos latitudes?

 

« Des effets indésirables »

Fractures de côtes.

Dans les références bibliographiques appelées par les auteurs, quelques éléments semblent avoir été occultés, ou soumis à interprétation rapide.

1 fracture pour 1000 chez les enfants hospitalisés dans un service unique de pédiatrie, sur une cohorte non précisée, c’est effectivement le propos de l’article  de Martin CHALUMEAU & al, rapporté par C CHANELIERE dans les archives de pédiatrie (8). Pourquoi passer sous silence l’hypothèse de la fragilité osseuse transitoire (temporary brittle bone desease, TBBD) évoquée par MILLER ? (9)

Le « Sou médical* » ne semble pas rapporter de données venant corroborer ces chiffres.

si nous ne considérons que les 25000 séances répertoriées par le réseau bronchiolite île de France, ce ne seraient pas moins de 25 fractures de côtes qui seraient déclarées en 5 ans sur la région parisienne, uniquement durant les week-ends entre la fin octobre et la mi mars ! Soit environ 500 fractures de côtes annuelles sur l’ensemble du territoire…


une telle hécatombe serait elle passée sous silence depuis si longtemps ?


Pire que le VRS, l’épidémie de fracture costale !.

L’observation des données émanant des 17 réseaux identifiés en France autour de la problématique de la bronchiolite, et précisant les conditions techniques de réalisation des séances (faisant toutes référence à l’AFE), ne permet pas plus de conclure à la dangerosité de la kinésithérapie.

Il n’existe pas à notre connaissance d’autres données qui puisse éclairer cette position.

 

Conscients du fait que la technique de kinésithérapie respiratoire est « praticien dépendant », nous avons intégré à notre fiche d’observation une évaluation de la douleur et de l’intégrité des structures, renseignée avant et après la séance (10)

« En pratique, pas de kinésithérapie, et transfert aux parents de la surveillance de leur enfant ».

Nous l’avons écrit à de maintes occasions, (2,3,4,11), la kinésithérapie d’aujourd’hui ne peut plus se définir uniquement à travers des gestes techniques. L’évaluation, la communication, ainsi que l’éducation en santé, complètent l’approche technicienne, ce qui ne diminue en rien sa pertinence. Dans une vision globale de l’approche de la santé, nous sommes des partenaires du médecin, mais aussi des parents, autour du projet de santé de ces nourrissons. L’éducation en santé se fixe comme objectif l’autonomisation de l’individu vis-à-vis de sa santé, et savoir surveiller son nourrisson présentant une gène respiratoire est une compétence à faire acquérir, dans la mesure du possible, au plus grand nombre.

Il n’en est pas moins vrai que le professionnel de santé qu’est le kinésithérapeute, par ses compétences à évaluer l’encombrement de ce nourrisson constitue un maillon de la chaîne de soins qui a montré sa capacité à influer sur le recours systématique et non justifié aux services d’urgences hospitaliers qui faisaient encore la une des journaux télévisés il y a quelques années.  

 

Au total :

La question centrale est bien à nos yeux de savoir quel risque fait porter cette prise de position dogmatique sur la santé des nourrissons aujourd’hui pris en charge par les kinésithérapeutes dans le cadre du traitement, du suivi, de l’observation, de l’accompagnement durant la phase potentiellement évolutive de leur accès pathologique.

Nous affirmons que les simples indicateurs que constituent la diminution du nombre d’enfants hospitalisés, la diminution de l’age moyen d’hospitalisation des nourrissons, ainsi que la mortalité nulle, mesurée sur plusieurs années, (versus les statistiques étasuniennes chères à nos détracteurs), justifient le recours à la kinésithérapie respiratoire. Nous adhérons totalement au fait que des travaux scientifiques méthodologiquement parfaitement conduits doivent corroborer les hypothèses aujourd’hui évoquées (2). Dans un souci d’amélioration de la santé publique, les énergies doivent à notre sens s’unir, et éclairer les options thérapeutiques en se détachant des conflits d’intérêts, des querelles de clocher.

 

 

 

Bibliographie :

 

1- ANDEM, conférence de consensus, place respective des techniques non instrumentales de désencombrement bronchique, LYON, déc. 1994, ANAES. Conférence de consensus sur la prise en charge de la première bronchiolite du nourrisson. 2000. www.anaes.fr

 

2- PELCA D, FAUSSER C, EVENOU D., LABRUNE P., GATTO F, La kinésithérapie respiratoire pédiatrique en 2006, vous la prescrivez, mais quelle est elle, ou encore que peut elle être ? Le kinésithérapeute : auxiliaire, correspondant ou partenaire du pédiatre ? La revue des entretiens de Bichat, Expansion Formation et Editions, Mai 2006-N°32, p 56-61

 

3- EVENOU D, PELCA D , FAUSSER C , SEBBAN S, Modalités pratiques actuelles de la prise en charge kinésithérapique de la Bronchiolite, Médecine, Ed John libbey, Eurotext, janv 2007.

 

4- FAUSSER C, PELCA D, EVENOU D, LABRUNE P, GATTO F, les savoirs académiques et les bonnes pratiques en kinésithérapie respiratoire pédiatrique Kinésithérapie scientifique, N°462, SPEK, PARIS 2006, pp7-15 (revue indexée dans Médexpress, EMC, Rédatel et

la base PASCAL

de l’INIST).

 

5- EVENOU D, PELCA D. le réseau bronchiolite île de France, une dynamique en constant renouvellement. Sociologies pratiques, PUF, N°11, 2005. pp 73-85

 

6- EVENOU D. PELCA D. PICARD H. évaluation d’un réseau de santé sur l’évolution des pratiques professionnelles- une expérience, le réseau bronchiolite île de France. ReK, Recherches en Kinésithérapie N°2. Société de presse en kinésithérapie (SPEK). oct 2004.

 

7- Foucault, naissance de la clinique, PUF., 1963, p. XV.

 

8- FAUSSER C, PELCA D, EVENOU D. fiche d’observation et de transmission kinésithérapique « ARB » 2003-2004. Kinésithérapie scientifique, N°441, SPEK, PARIS, 2004, pp.27-36 (revue indexée dans Médexpresse, EMC, Rédatel et la base Pascal de l’INIST

 

9- M CHALUMEAU & al, rapporté par C CHANELIERE fractures costales au cours des bronchiolites aiguës virales : à propos de 2 cas Archives de pédiatrie 13, 2006, 1410-1412

 

10- MILLER ME. Infa,ts at higher risk to fracture than the general population of young infants. Pediatr Radiol 2003; 33:733-4, MILLER M. the lesson of temporary brittle bone diseas: allbones are not created equal. Bone 2003; 33:466-74.)

 

11- FAUSSER C, BREHERET V, LOPES D. augmentation du flux expiratoire et tolérance, Kinésithérapie scientifique, SPEK 2002, n°428, p 21-27)

 

12- M Chalumeau & al, Rib fractures after chest physiotherapy for bronchiolitis or pneumonia infants, Pedia Radiol (2002) 32 : 644-647)

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